Examen d’Entrée en 6ème : Vers une réforme indispensable (Lettre ouverte au MEN)

(De la nécessité de réformer le concours d’Entrée en 6ème)

Monsieur le ministre,

Dans un mois environ, débuteront les épreuves écrites du certificat de fin d’études élémentaires. Qu’il me soit alors permis, dans ce deuxième courrier dont vous êtes le principal destinataire,  de souligner ce qui semble être à mes yeux une inconvenance de notre époque : le concours d’entrée au collège ou Entrée en 6ème.

Comme vous le savez, la fin de l’Enseignement élémentaire est sanctionnée par un examen dénommé CFEE. Cet examen a la double vocation d’attribuer un diplôme à des apprenants de moins de quatorze ans, et de « permettre la sélection des candidats pour l’admission en classe de sixième en fonction du nombre de places disponibles » selon les dispositions du Décret n°2013-738 du 07 juin 2013 portant création et organisation du certificat de fin d’études élémentaires (CFEE) et fixant les conditions d’admission en classe de sixième de l’Enseignement moyen général.

Le premier but de cet examen était plus qu’une simple « lutte des places » en première année du cycle secondaire, un moyen d’évaluation de notre cycle fondamental. Nous l’avons tous connu, plus ou moins de la même façon, avec la même charge psychologique. Avec le recul, chacun peut aisément revoir toute la violence symbolique qu’il y avait dans le passage de ce concours obligatoire pour la poursuite des études au lycée ou au collège. Mais, cela a-t-il jamais été un pertinent prétexte militant en faveur de sa suppression ?

Monsieur le ministre, comme vous pouvez l’imaginer, les jeunes apprenants devant « subir les épreuves » de cet examen sont mentalement brimés, peinés par la façon dont cette compétition est organisée. L’usage même du mot « épreuve » rend compte à suffisance, de la lourdeur de l’opération. Les potaches arrivent très tôt le matin à leurs centres d’examen, accompagnés quelques fois de leurs parents. Beaucoup d’entre eux n’ont pas du tout ou ont peu dormi la veille, du fait de l’appréhension de l’examen ou de l’excessive pression d’un parent tenant coûte que coûte à la réussite de sa progéniture. Pour leur part, les enfants sont généralement désorientés, troublés par le fait que tout soit mis en place, lors de cette journée d’examen redoutable, pour les effrayer. L’inconfort est à son comble. La présence d’autres enfants, inconnus, que le hasard a mis là ; les visages des maîtres-surveillants, eux aussi inconnus, trop silencieux, quelque fois à la limite de la froideur, austères et souvent hostiles renforcent leur désarroi. Le mystère volontaire autour du cérémonial de l’ouverture d’enveloppes contenant les sujets ne sera pas la dernière source d’affolement. Cette (dé)charge psychologique appliquée à des garnements faisant un corps à corps quotidien avec l’échec brouille le cœur et l’esprit du potache sur son pupitre. Tout dans l’organisation de ce concours prédispose à l’échec, même si quelques-uns, en parfaite maîtrise du jeu et des enjeux finissent toujours par démythifier cette journée d’évaluation. D’ailleurs, nombre d’entre nous considérions les sujets d’examen comme des « épreuves » à administrer. L’éducateur ayant l’expérience de la surveillance est souvent peiné par la stupeur et l’angoisse dans lesquelles baignent ces pauvres enfants de onze/ douze ans, desquels on attend un travail sérieux et ordonné, mais aussi des copies bien présentées.

Il est aujourd’hui sérieusement établi que l’examen de fin de cycle élémentaire est profondément malade de sa forme d’organisation. Il est donc d’une impérieuse nécessité de le réformer. Lorsqu’une partie du corps humain est gangrenée, nous avons deux choix : la récupération ou l’extraction, le soin ou l’amputation. L’un dans l’autre, le choix de l’élimination d’une partie de l’organisme se place toujours en dernier recours. De la même manière, lorsqu’une partie du système éducatif présente des signes de faiblesse, le remède le plus approprié est le recadrage/réorientation. D’ailleurs, tous ces biais par rapport à l’épanouissement et à la bonne mobilisation de toutes les ressources intellectuelles de l’enfant jalonnant l’administration des sujets apparaissent comme une invite à la réforme.

Excellence monsieur le ministre, l’enseignant singulièrement celui du CM2, doit faire son mea culpa. Certains d’entre eux, commencent dès le mois de janvier à soumettre leurs élèves à un « régime pédagogique », c’est-à-dire ne plus faire que des cours de consolidation/renforcement pédagogique portant sur les sujets d’examen. Jusqu’à la veille du grand jour, ils entraînent les enfants à passer l’examen, épuisant toutes les annales disponibles. C’est ici le lieu de rendre hommage à l’illustre Alioune TALL et à tous les autres auteurs du même acabit. Ainsi, toute l’année scolaire durant, le « bout d’homme » a subi un bourrage pénible et inutile, négligeant toutes les « matières secondaires ». Quitte à user tout le potentiel des enfants, l’enseignant animé de la légitime propension à « faire réussir » ses élèves, ferme souvent les yeux sur l’avenir immédiat de ses protégés. Il se pose rarement la question de ce que seront ces élèves une fois en classe de quatrième ou troisième. L’essentiel pour lui, était de faire une performance de  100% de réussite. Dans cette préparation, l’instituteur va jusqu’à donner à son élève des solutions adaptées voire adaptables aux divers problèmes, ce qui fait que lorsque les données des sujets à l’examen sont inversées, c’est l’hécatombe !

Monsieur le ministre, je pense dès lors que l’examen du Cours moyen 2ème année est en lui-même problématique. Il s’agira d’aller plus loin que le CFEE, c’est-à-dire repenser cette forme cumulée de l’Entrée en 6ème et du certificat d’étude primaire élémentaire (CEPE). Peu importe son appellation, mais il faut instaurer une évaluation des capacités et compétences en fin de cycle. L’aptitude de l’apprenant à poursuivre des études dans un domaine précis doit être mesurée. Le but ne sera pas d’éliminer des candidats, mais plutôt d’en identifier les moins aptes afin de les réorienter dans d’autres filières. Il ne sera pas question de supprimer un concours ou un examen, mais d’élargir « les mailles du filet » pour que ne soient retenus vraiment que les plus faibles, dans les domaines de l’apprentissage théorique. Ce dernier lot pourra être reversé dans l’apprentissage de métiers, la formation professionnelle. Identifier et non éliminer, réorienter et non supprimer, ces buts ont-ils été réellement visés ? Combien ont réussi plus tard leur vie, alors qu’ils ont été contraints d’abandonner l’école faute d’être sélectionnés ? Beaucoup de nos camarades ont quitté l’école parce qu’ils ne comprenaient pas le français, mais du fait d’une capacité d’appréhension et d’analyse avérée, sont devenus d’excellents managers en ceci ou cela.

Monsieur, je suis d’avis que l’option la plus évidente et qui est à notre portée sera la mise en place dans chaque établissement secondaire d’une commission d’admission chargée de sélectionner sur dossier, les élèves devant passer en classe de 6ème

L’admission au collège ou au lycée doit être méritée, cela justifie le maintien de cette  première évaluation générale de l’élève. Ce choix est d’autant plus intéressant qu’à mesure d’augmenter ou de rétrécir la taille des mailles du filet, nous pouvons parvenir à établir plusieurs niveaux d’admissibilité en fonction du nombre total de points engrangés sur la base de l’examen du dossier de l’élève. Par exemple, on pourrait définir un premier niveau réservé à l’obtention d’une bourse d’Etat, un deuxième niveau pour l’admission dans un établissement spécial (école d’excellence, maison d’éducation spécialisée, etc.) et un 3ème niveau pour l’admission en 6ème. La distribution des points peut donner le schéma suivant : L’élève ayant obtenu une mention « TRES BIEN » accède aux 3 niveaux ; celui qui aura obtenu la mention « BIEN » accèdera aux deux premiers niveaux ; en fin celui dont la mention est « PASSABLE » aura juste acquis le ticket d’entrée à un collège.

En définitive, Monsieur le ministre, voilà les raisons pour lesquelles, j’estime qu’une réforme de l’examen incluant le passage en classe de 6ème est inéluctable, au nom de la rupture.

Qu’il vous plaise donc, de commencer à chercher, car je sais que vous pouvez y arriver.

Avec mes respectueux hommages et mes félicitations renouvelées, je vous prie d’agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de ma considération la plus distinguée.

LAF

Un commentaire

  1. He contents highlights the psychological burden and pressure faced by young students during the entrance exam to 6th grade. It suggests a reform to shift from a competitive selection to a more comprehensive assessment that identifies and guides students based on their abilities. The proposed actions are:

    1. Reform the entrance exam to focus on evaluating students’ capabilities and competencies rather than strict selection.

    2. Implement a commission to review student dossiers for admission to 6th grade, considering different levels based on academic performance.

    3. Encourage a more holistic approach to admission, considering various levels of achievement for different educational paths.

    The letter effectively communicates the need for reform, emphasizing the impact on students’ well-being and proposing practical solutions for a more inclusive evaluation process.

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